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26 Mar Joseph Kosuth, les mots à l’œuvre
A l’été 1970, au MoMA, à New York, un jeune artiste de 25 ans expose une chaise. Oui, une chaise. Au mur, une photo de ladite chaise et la définition du mot « chaise ». Non loin de là, toutes sortes d’œuvres d’art surprennent le visiteur de l’exposition « Information ». Un plasticien, Vito Acconci, a fait un transfert de courrier au MoMA et vient tous les matins chercher ses lettres. Un autre, Hans Haacke, distribue des questionnaires aux visiteurs leur demandant s’ils approuvent le soutien de Nelson Rockefeller, gouverneur de l’Etat de New York et ancien président du MoMA, à la guerre du Vietnam. Un poète, John Giorno, a installé un service téléphonique où il suffit de composer un numéro pour entendre une voix réciter des poèmes au bout de la ligne.
Joseph Kosuth, l’auteur de l’œuvre nommée One and Three Chairs, a beau être très jeune, il fait sensation. Avec morgue, il assure que l’artiste n’est pas un artisan dont il faudrait saluer le beau geste, mais un intellectuel qui pense avant de créer. Il est le petit génie tapageur, celui qui, alors même qu’il était étudiant à la School of Visual Arts, s’est vu nommé enseignant avant même d’obtenir son diplôme, celui qui a tapé dans l’œil de Marcel Duchamp, qui voit en lui un de ses héritiers potentiels. Bientôt, il partira au Royaume-Uni, où il sera proche du collectif Art & Language.
Né en 1945 à Toledo, dans l’Ohio, le plasticien américain aura marqué l’art de la fin du XXe siècle. Avec d’autres membres du courant de l’art conceptuel, comme Lawrence Weiner, ils ont fait des mots la matière même de leurs œuvres, quand les peintres d’autrefois représentaient des puissants ou des paysages. Une œuvre de Kosuth est constituée de sept cadres accrochés les uns à côté des autres. Sur l’un, on lit « tableau ». Sur l’autre, « art ». Puis « carré », « mot », « anglais ». Tout ce qu’on voit est signifié. Idem quand il imagine un néon en forme du mot « néon ».